Tes grands yeux de velours sont plus noirs que ta chair.
Baudelaire « À une Malabaraise » publié en1866.
Spleen et idéal.
Constant Georges Gasté.
Portrait de femme de Bou Saada 1896 40x33cm.
Musée Magnin, Musée des Beaux-Arts Dijon.
Exposition « Le Grand Tour, voyage(s) d’artistes en Orient » (2019-2020).
Épris d’orientalisme, Gasté a peint cette jeune femme en 1896, à 27 ans, alors qu’il séjournait à Bou Saada avant d’aller finir sa vie en Inde du Sud à Madura en 1910.
Formé aux Beaux-Arts de Paris, dans l’atelier du peintre académique Alexandre Cabanel (La naissance de Vénus), contemporain de Bonnard, Vuillard, …, il a été attiré puis fasciné, très jeune par la lumière du Maghreb ; il s’installa quatre ans à Bou Saada, la première oasis, quand, venant d’Alger, on prend la route de l’Aurès et de Biskra. Partageant la vie des autochtones, il a peint de nombreux portraits et scènes du quotidien. Le Grand Palais consacra deux rétrospectives posthumes, en 1911 et 1913, pour celui qui fut considéré de son vivant comme « le peintre des Indes ». Ses photographies sont aussi considérées aujourd’hui comme des œuvres d’art et des documents ethnographiques.
Ce portrait est celui d’une jeune algérienne, sans doute une berbère, son visage entièrement découvert l’attestant, appartenant peut-être à la tribu des Ouled Naïl, dont les femmes, sont réputées pour leur beauté et bonnes danseuses.
Le tableau, exécuté en larges touches, avec une palette chromatique chatoyante, dénote la formation du peintre, à l’école de l’académisme, certes, mais qui puise aussi son inspiration dans le réalisme d’un Courbet et dans le postimpressionnisme d’un Cézanne. Il se dégage des lèvres pulpeuses une sensualité lascive et des yeux au regard profond une invitation effrontée aux mystères de l’Orient.
Alain Grandjean (le 21 mai 2020).
Georges Gasté en 1908 Domaine public (Inconnu).